Salarié ou autoentrepreneur ? Avec le développement des plates-formes Internet et la libéralisation du marché du travail, le débat sur l’encadrement des nouvelles formes d’emploi n’a cessé de prendre de l’ampleur ces dernières années. Pour les entreprises, l’émergence d’une nouvelle économie justifierait une plus grande flexibilité par le biais du statut d’autoentrepreneur, au détriment du salariat, beaucoup plus protecteur pour les travailleurs. Alors que la régulation de ce nouvel écosystème n’en est qu’à ses balbutiements, la chambre sociale de la Cour de cassation a rendu le 28 novembre un arrêt lourd de conséquences. De façon inédite, la plus haute juridiction, en cassant une décision de la cour d’appel de Paris rendue le 20 avril 2017, a reconnu à un livreur à bicyclette le statut de salarié, alors que son employeur, la société Take Eat Easy, lui avait imposé celui d’autoentrepreneur. Cette requalification va permettre au livreur de faire valoir ses droits de salarié avec la possibilité de se faire payer ses heures supplémentaires, des indemnités de congés payés et de licenciement et de prétendre à une indemnisation chômage. L’arrêt de la Cour de cassation apporte une clarification juridique bienvenue, alors que l’autoentrepreneuriat concerne de plus en plus de Français. En 2017, ce statut concernait 1 183 000 personnes, un chiffre en hausse de 11 % en un an. Cette statistique recouvre des situations hétérogènes, qui, dans certains cas, peuvent déboucher sur des abus manifestes. Sous prétexte de modernité, l’autoentrepreneuriat peut être synonyme de précarité pour des personnes déjà fragilisées économiquement, contribuant par la même occasion à diminuer de façon substantielle les ressources de l’assurance-chômage. A ce stade, le gouvernement a plutôt fait le choix de favoriser le développement de l’autoentrepreneuriat grâce à une série de simplifications administratives.
Employee or self-employed? With the development of Internet platforms and the liberalization of the labor market, the debate on the regulation of new forms of employment has grown steadily in recent years. For companies, the emergence of a new economy would justify greater flexibility through self-employment, to the detriment of wage labor that is much more protective for workers. While the regulation of this new ecosystem is still in its infancy, the labor chamber of the Court of Cassation made a judgment on November 28 with serious consequences.
In an unprecedented manner, the highest court, by overturning a decision of the Paris Court of Appeal on April 20, 2017, has acknowledge the status of employee to a bicycle deliveryman, whereas his employer, the company Take Eat Easy, forced him to work on a self-employed basis.
This requalification will enable the driver to assert his rights as an employee with the possibility of being paid overtime, vacation and dismissal allowances, and to claim unemployment benefits. The judgment of the Court of Cassation brings a welcome legal clarification, as self-employment concerns more and more French people. In 2017, this status concerned 1,183,000 people, an increase of 11% in one year. This statistic covers heterogeneous situations, which in some cases may lead to obvious abuses. Under the pretext of modernity, self-employment can be synonymous with precariousness for people already economically weakened, while at the same time contributing to a substantial loss for the Unemployment Insurance. At this stage, the government has instead chosen to promote the development of self-employment through a series of administrative simplifications.
Autoentrepreneur, un statut à améliorer, 12/2018, lemonde.fr.
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